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L’abeille Buckfast, pourquoi et comment la choisir

L'abeille et son environnement, Techniques apicoles

L’abeille Buckfast est une abeille hybride plébiscitée par la communauté apicole, même si elle est parfois critiquée par certains de ses détracteurs. Regardons tout ça d’un peu plus prés.

Crée par Karl Kehrle (le Frère Adam) à l’abbaye de Buckfast dont elle hérita du nom, cette abeille est née à la suite d’un heureux croissement (par ligustica & carnica) qui survécu aux ravages d’un parasite qui dévasta le cheptel apicole du Royaume Uni au début du sècle dernier. Par la suite, le frère Adam consacra sa vie à l’amélioration de cette abeille hybride en recherchant une abeille résistante aux maladies, douce et facile à travailler et bien entendu très productive.

La réputation de cette abeilles grandissant au fil des décennies qui suivirent, une grande proportion d’apiculteurs européens l’adoptérent.

Aujourd’hui, l’abeille Buckfast est répandue et réputée dans le monde entier, mais c’est en Europe de l’ouest qu’elle est devenue majoritaire.

Alors pourquoi ne pas garder notre abeille noire locale?

 

La réponse est rapide et sans appel : Oui, il FAUT (aurait fallu) conserver et protéger notre abeille endémique apis mellifera mellifera.

Seulement voila, à force d’introduction de sous-espèces exotiques et/ou de création d’abeilles hybrides aux caractéristiques annoncées comme supérieures à toute autre, nous avons tous été attirés par ce doux chant des sirènes et notre abeille noire locale a périclité pour finalement presque totalement disparaitre de notre territoire, tout du moins dans sa forme pure d’origine.

J’ai été d’ailleurs très longtemps un fervent défenseur d’apis mellifera mellifera, mais en pratiquant la biométrie alaire durant plus de 10 ans, force est de constater que les taux d’hybridations excédent 40 à 60% (voire beaucoup plus) et conduisent au déclin inévitable de cette abeille si parfaitement adaptée à son aire de répartition.

Si des conservatoires existent, les moyens mis en œuvre ne peuvent suffire à faire perdurer la pureté de cette abeille. À l’instar de certains Etats européens, seul un programme d’ampleur initié par nos institutions pourrait la maintenir mais rien de sérieux n’a jamais été entrepris en France, excepté en Corse où l’introduction de toute abeille exotique est interdite.

Quelle abeille choisir? La Buck en détail

Face à ce constat, il faut donc prendre une direction sensée. J’ai choisi la Buckfast pour ses qualités indéniables mais également parceque justement, c’est une abeille hybride.

On l’a vu précédemment, aujourd’hui toute sorte d’abeilles peuplent nos ruchers. Même en choisissant une race pure, certains caractères s’expriment très fortement dès la première hybridation ; c’est le cas par exemple pour l’agressivité ou la propension à l’essaimage.

En choisissant une abeille croisée comme la Buckfast, on conserve en F2 (petite fille de la souche) une bien meilleure stabilité des caractères qui nous intéressent comme par ex. la douceur ou la résistance aux maladies.

 

Les avantages de l’abeille Buckfast

Que ce soit chez l’apiculteur de loisir comme chez le pro, les caractéristiques recherchées chez l’abeille sont toujours les mêmes, et à mon sens, c’est la Buckfast qui y répond le mieux:

  • Douceur (travail sans gants, pas de suiveuses ou d’attaque à distance)
  • Bonne tenue au cadre (les abeilles restent calmes et sur leur cadre lors des visites)
  • Faible tendance à l’essaimage (sauf erreurs de l’apiculteur cool)
  • Très bonne productrice de miel
  • Très hygiénique (bonne nettoyeuse, élimination du couvain douteux ou malade, de la fausse-teigne etc.)
  • Entoure bien le couvain (provision de pollen et miel autour du couvain)
  • Gère bien ses réserves (la reine réduit sa ponte l’hiver ou lorsque les ressources manquent)
  • VSH/SMR (grâce à la sélection, de plus en plus résistante à varroa destructor)
  • Croisement naturels moins “empiriques” (en 1ère descendance tout du moins)

 

Ses points faibles

Si cette abeille présente de grandes qualités, elle n’en est pas pour autant parfaite bien entendu.

En fait, nous le verrons plus loin dans cet article, mais de par la diversité des sélections chez l’abeille Buckfast, il est difficile de parler de défauts à son sujet. Il serait plus judicieux d’énumérer ce qui lui est parfois reproché.

  • Consommatrice l’hiver (demande un peu plus de réserves pour passer l’hiver)
  • Pas toujours la meilleure en miellées précoces
  • Tendance à propoliser (personnellement, je n’ai jamais constaté ce défaut…)

Tous ces “défauts” sont directement dépendant de la sélection qui en est faite, à l’instar des autres caractéristiques recherchées.

Concernant la consommation, il est vrai qu’elle consomme un peu plus que la noire par ex. sans pour autant consommer à l’excés. Sur les balances, je n’ai jamais constaté de consommation plus importante que 80 à 100g/ jour l’hiver, ce qui est tout à fait raisonnable.

Pour les miellées précoces, j’ai fait sur plusieurs années un comparatif avec des ligustica sensées pondre à l’excés, et aucune de ces dernières n’a été plus précoce que la plus tardive de mes Buck. Comme quoi…

Les Buckfast sont-elles identiques d’un éleveur à un autre?

Ce sont ces contradictions qui nous amène à regarder de plus près l’origine de ces disparités d’opinions.

Tout d’abord, l’histoire de cette abeille est malgré tout très récente et continue d’évoluer. Par conséquent, rien n’est définitif chez la Buckfast.

Par exemple, pour revenir sur cette problématique de sur-consommation hivernale, si dans les années 1990 à 2010 on avait tendance à sélectionner des Buckfast qui “pondaient au carré” pour avoir un maximum d’abeilles – c’est à dire qu’un cadre de corps était totalement rempli de couvain – il n’y avait pas assez de nourriture autour du couvain, ce qui impliquait un soutien en nourrissement plus conséquent. Problématique accentuée par la raréfaction des ressources de ces dernières années.

Depuis quelques années donc, cette sélection tend à disparaitre au profit d’une abeille qui entoure bien le couvain de nourriture et qui sait s’adapter aux ressources environnantes, ce qui d’ailleurs devient la gageure d’une apiculture moderne et durable.

 

Des lignées presque autant différentes que les éleveurs.

Le frère Adam n’a pas croisée ses Buckfast à partir d’une seule sous-espèces. Il a parcouru le monde à la recherche de nouvelles souches présentant certaines caractéristiques bien précises. Une des plus connues étant la Sinop62 pour la pure anatolica par ex.

Pour ces raisons, une fois validés les caractères essentiels qui font d’une abeille une Buckfast, une grande diversité existe malgré tout entre toutes ces lignées en fonction des caractères d’origine de la souche mais également des choix des croisements pratiqués.

 

Les Buckfasteurs

Ces lignées, si le frère Adam en a créé une bonne partie, certains éleveurs continue son travail en en créant de nouvelles. C’est en partant de souches pures qu’à force de croisements savamment orchestrés, on fini par obtenir une nouvelle lignées Buckfast une fois stabilisée.

Ces éleveurs pratiquant ce type de croisements sont peu nombreux, le besoin en nouvelles lignées n’étant pas des plus indispensable à l’heure actuelle.

 

Les Sélectionneurs

Les sélectionneurs sont des éleveurs qui vont affiner les qualités des lignées Buckfast en partant de lignées deja existantes. La plupart du temps, ils produisent également des reines fécondées pour la vente.

 

Les Multiplicateurs

L’élevage par multiplication consiste à produire en nombre des reines filles issues de souches achetées chez différents sélectionneurs. Ces reines sont destinées à la vente.

En réalité, il existe peu de multiplicateurs car bon nombre d’éleveurs d’aujourd’hui sélectionnent également leurs souches, afin de les adapter à notre environnement. Ils pratiquent en interne l’insémination artificielle pour leurs souches afin de garantir avec certitude la pureté côté père, chose impossible en fécondation naturelle.

La sélection spécifique VSH

Le fléau N°1 de l’abeille est sans conteste Varroa Destructor. Grace à de nombreuses recherches initiées aux états unis et largement améliorées par les travaux de Paul Jungels et Joss Guth pour ne citer qu’eux, la sélection VHS (Varroa Sensitive Hygiénic, c’est à dire pour faire très simple la résistance de la colonie au varroa), devient de plus en plus prometteuse et applicable, pour peu qu’on maitrise la côté père lors des fécondations naturelles, ce qui est malgré tout loin d’être une mince affaire…

Une bonne partie des éleveurs d’aujourd’hui tentent d’augmenter l’expression de ces caractères VSH dans leur sélection, avec des résultats de plus en plus encourageants.

Dans mon élevage, les résultats s’améliorent d’année en année, et même si je ne peut garantir des déscendances résistantes à coup sur, il n’en n’est pas moins vrai que la majorité des filles produites le sont.

Le choix de vos futures Buckfast

On a vu que pour l’abeille Buckfast (et c’est aussi vrai en race pure d’ailleurs), tout est fonction de l’éleveur et on peut avoir du bon comme du mauvais, avec des caractères spécifiquement orientés par les choix du sélectionneur.

Certains apiculteurs vont chercher l’extrême douceur, d’autre la production de couvain à outrance, ou encore l’abondance des récoltes de miel, là où certains ne verront qu’à travers la sélection VSH etc.

Tout est affaire de choix et d’équilibre. Pour ma part, j’essaie surtout de sélectionner une abeille équilibrée prioritairement autonome et adaptée à notre territoire spécifique qui n’a rien à voir avec les pays du Nord de l’Europe.

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