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La location de ruches en entreprise : j’arrête!

L'abeille et son environnement

La demande de location de ruches en entreprise et collectivités est celle que je reçois le plus. Pourtant, je l’ai totalement écartée de mon activité. Voici pourquoi :

Bien qu’ayant proposé des ruches en location par le passé, je me suis rendu compte à l’usage que c’était un non-sens tant pour l’abeille que pour l’apiculteur voire pour l’entreprise locatrice elle même.

La location de ruches en entreprise, c’est quoi exactement ?

Le principe est simple. L’entreprise met à disposition de l’apiculteur un emplacement pour une ou plusieurs ruches sur le toit de son bâtiment. L’apiculteur y dépose les ruches en question et les suit comme il peut. Si une récolte a lieu, le miel est donné à l’entreprise ou la collectivité locatrice, le plus souvent arborant le logo du locataire sur l’étiquette.

A offrir à ses clients ou collaborateurs en fin d’année, c’est quand même plus intelligent que la Nième bouteille de vin ou le Nième bloc de foie gras qu’ils reçoivent chaque année ! C’est indéniable.

Parfois, il est proposé une visite des ruches à une partie des collaborateurs de l’entreprise, ce qui représente un très bon vecteur éducatif et de sensibilisation. Après tout, c’est bien ce qu’on recherche non ? Le partage et la sensibilisation.

Un autre aspect, motive autant les apiculteurs que les entreprises. C’est le fait d’avoir ses ruches éloignées des pesticides issus des cultures, en restant dans les zones urbanisées. De plus, l’expansion de la politique zéro phytosanitaires dans les communes de France vient conforter ce réflexe.

Alors tout est parfait dans le meilleur des mondes, me direz-vous ! Pas si sur…

Une source d’ennuis mal mesurée

Ce type de conduite représente énormément plus de travail par ruche qu’en conditions normales.

On est loin de la mise en place d’une ruche dans un espace verdoyant et sans bruit. Le plus souvent, il faut se casser le dos à monter les ruches au dernier étage, les passer par une trappe minuscule, risquer de la faire tomber etc. C’est sur, on est pas trop dans l’ambiance bucolique de l’apiculture naturelle.

Si l’apiculteur déclare bien ses ruchers, il aura pris soin de déclarer tous ses emplacements, y compris pour chaque ruche en entreprise. Mais qu’en est-il des autorisations?

A ma connaissance, il n’existe pas de texte clair sur le sujet. Les emplacements de ruches répondent à 2 règles simples : être au minimum à 10 mètres d’une limite séparative (variable selon les communes) et/ou séparées par une haie pleine naturelle ou artificielle de 2m de haut et débordant de 2 m de chaque côté de la ruche. Rien n’est prévu sur le plan vertical. L’espace de 2m sur un plan vertical est-il considéré comme une haie artificielle? Quoi qu’il en soit, la plupart du temps, la fenêtre du dernier étage est à moins de 2 mètre en dessous de la toiture.

Bon, admettons. On va pas pinailler. Mais alors que disent les assurances ?

Toutes les ruches doivent être assurées en Responsabilité Civile, c’est la loi. Pour avoir consulté à plusieurs reprises différents assureurs, leur réponse est simple : ne sont assurées que les ruches qui ont été déclarées annuellement au service compétent. Très bien, je déclare tous mes ruchers, même pour une seule ruche. Ma question suivante concerne la mise en place sur le toit d’une entreprise. Leur réponse : vous devez vous conformer aux prescriptions légales, autrement, nous ne couvrons pas le risque (vous connaissez les assurances). Bien entendu, en cas de litige, ça doit bien pouvoir se plaider…

Autre point décisif sur le plan sécuritaire est que de nombreux intervenants sont amenés à accéder sur un toit, que ce soit dans un cadre de maintenance, de travaux etc. Que se passe-t-il si un ascensoriste allergique se fait piquer? ou encore si simplement il prend peur pensant être attaqué et se met à fuir? Je vous rappelle qu’un toit n’est pas une terrasse et que dans la majorité des cas, il n’y a pas de garde-corps. Lui il a rien demandé. Il allait juste effectuer sa visite d’entretien. Qui est mis en cause ? L’apiculteur ? l’entreprise ?

Une chose est sûre, c’est qu’en cas de dommage corporel, la justification de l’interprétation des textes ne tiendra ni face aux assurances, ni devant un tribunal.

Et l’abeille dans tout ça ?

L’homme a cette fâcheuse tendance à vouloir adapter la nature à son mode de vie plutôt que l’inverse. Pourquoi retirer l’abeille de son milieu naturel pour la placer dans notre univers artificiel et bétonné ? Quand on prend un peu de recul, on peut l’entrevoir et ça parait complétement dingue. Mais restons pragmatiques.

D’une manière générale, les ruches en entreprises sont nettement moins populeuses que dans les ruchers classiques. Je n’ai pas cherché la (les) raisons, mais les premières pistes sont un suivi inévitablement moins rigoureux de la part de l’apiculteur ainsi qu’un emplacement mal adapté à l’abeille.

Dans un autre cadre professionnel, j’ai été amené à monter très régulièrement sur tous les types de toits (avec cette notion de sécurité en trame de fond d’où ma réflexion précédente). Et ce que je peux vous dire, c’est que c’est probablement l’endroit le plus nocif des zones urbanisées. Entre les rejets des VMC chargées d’odeurs nauséabondes pouvant être transmises au miel, les émanations gazeuses en tout genre tels que monoxydes de carbone, dioxydes de carbone, hydrogène sulfureux des ventilations primaires, ou encore particules fines, et je ne vous parle pas des cheminées de chaudières voire pire, des incinérateurs dans certains bâtiments…

Au delà de ça, la ruche est malgré tout plus exposée aux vents, ce qu’elle déteste par dessus tout. Ce serait que ça, ce serait pas trop grave.

Les abeilles devant butiner au sol, vont descendre plusieurs dizaines de mètres. Le soucis étant qu’une abeille chargée en nectar pèse environ 1,6 fois son poids initial. Cette charge, elle devra la remonter sur toute la hauteur du bâtiment. Vous imaginez l’effort ? Il est clair que sur cette base, sa durée de vie s’en retrouve largement diminuée.

Quant au miel récolté, si on s’accorde à dire qu’il est moins chargé en pesticides, il n’en est pas pour autant exempt, et reste pas moins chargé en divers produits chimiques, notamment hydrocarbures, issus de la pollution urbaine. Certaines analyses de miel font d’ailleurs ressortir des teneurs en plomb élevées.

Alors faut-il oublier la location de ruche ?

Vous l’avez compris, la location de ruches en entreprise et collectivités pose de réels problèmes d’ordre légaux, sécuritaires voire sanitaires dans des zones très urbanisées.

Néanmoins, ça représente un très bon vecteur économique et de sensibilisation qu’il serait dommage de négliger. Mais il devrait être cantonné à des zones faiblement urbanisées, dans un cadre sécuritaire réfléchi.

Une alternative écartant tous ces soucis consiste à ce que les entreprises parrainent une ruche. Certes, il n’y a pas directement accès à la ruche, mais que ce soit les collaborateurs, les clients ou les voisins, tous peuvent suivre la vie de la ruche. Le miel est également remis à l’entreprise, marquée de son logo.

 

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